Descendant du loup et domestiqué il y a plus de 30'000 ans selon les dernières études, le chien (Canis Lupus Familiaris) est notre meilleur ami, figurant au deuxième rang des animaux de compagnie préférés de l’homme, après le chat. Ses effectifs, en Suisse, se montent à 553'452 individus et 6 millions en France. Son apparence varie puisque selon la Fédération Cynologique Internationale (FCI), il existe, dans le monde, 356 races de chiens, le plus petit pesant 500g et le plus gros 90 kg. Son alimentation varie, aujourd’hui, entre les régimes proches du loup (RAW et BARF, composés de viande crue majoritairement) et les croquettes commerciales, qui composent la majorité des repas de nos canidés domestiques dans les foyers suisses. Il ne prédate donc plus pour se nourrir mais possède toujours, même si l’humain tend à l’oublier, un instinct de prédation, variant d’un individu à l’autre. Chaque année en Suisse, selon les statistiques officielles de la chasse, entre 500 et 700 animaux sauvages sont tués par des chiens. Ces incidents ont lieu lors de balades ou sont l’œuvre d’individus laissés libres et non surveillés. Il est recensé également quelques attaques sur des animaux d’élevage, morsures nécessitant des soins et conduisant à la mort dans certains cas (30-40 moutons tués annuellement).
L’amour que nous portons au chien est indiscutable mais il est également de mise de constater qu’au travers des décennies, l’humain a procédé à moultes manipulations et croisements génétiques sur le canidé domestique. Ces derniers visaient à obtenir des critères physiques variés (couleur/longueur du poil, différence de gabarits/taille, formes et positions des oreilles/queue etc.) mais aussi des accentuations ou diminutions de certains instincts, comportements ou traits de caractère. L’homme souhaite pouvoir choisir selon ses goûts, ses « besoins » en ce qui concerne les critères physiques. Et, au travers des modifications comportementales ou instinctives, la volonté de l’humain est de pouvoir ainsi travailler avec le canidé, de s’en servir dans différents domaines professionnels ou de loisir (chasse, protection/rassemblement des troupeaux, secours, aide aux personnes handicapées, recherches de différences substances etc.).
Mais la vérité est qu’aujourd’hui, le chien n’est plus que l’ombre du loup, pour nombre de races. Même si, génétiquement, l’ADN du loup est toujours présent chez notre compagnon, les instincts ont été, eux, passablement émoussés, parfois même effacés. Le canidé domestique porte également des stigmates physiques, engendrés par les caprices de l’homme. Plus de 600 maladies génétiques ont été répertoriées chez les chiens de race, ce qui est assez alarmant. On retrouve également des malformations telles les hanches abaissées (provoquant de la dysplasie à grand échelle, par ex. chez le Berger Allemand), l’aplatissement nasal (races brachycéphales telles le bouledogue français, le carlin etc.), de la surdité/cécité lors de « mariage entre deux individus porteurs du gène « merle » (Berger Australien) et, depuis 10-20 ans, une émergence de troubles digestifs et allergiques. Au niveau comportemental, les manipulations et autres croisements génétiques, tout comme la mauvaise sélection des individus dans des élevages peu regardants, amènent également des tares ou amplifient certains aspects comportementaux (hyperactivité, dépression, agressivité ou encore automutilation). Vous découvrirez, dans ce dossier, l'ampleur du "mal", soit la méconnaissance que nous avons du fonctionnement canin, l'incapacité à comprendre et respecter les besoins du chien et l'erreur d'apposer notre raisonnement humain pour évaluer les canidés. Cela mène, bien souvent et malheureusement, à des troubles comportementaux, à des incidents mais aussi à des abandons, les propriétaires se retrouvant dépassés et ne sachant plus comment gérer.
Il faut savoir qu'en ce qui concerne les modifications physiques, elles ont également des conséquences sur la communication entre chiens. Nous pouvons citer le front plissé (boxer, sharpei, carlin, bouledogue) ou la crête sur le dos, propre au Rhodesian Ridgeback, qui, chez le chien, sont des signes de menace. Mais aussi l'aplatissement du museau, provoquant en outre le fameux « syndrome obstructif respiratoire des races brachycéphales - SORB). Ces modifications entraînent des problèmes de communication et de compréhension, ce qui conduit ces races à être parfois victimes d'agression, sans que les propriétaires ne puissent en comprendre les raisons. En effet, les canidés communiquent au travers de vocalises, de marquages mais également grâce à des mimiques et postures. Certains signaux d’apaisement, que font les chiens pour communiquer le « non-conflit », apaiser l’autre et s’apaiser, sont désormais impraticables pour certaines races. Cela engendre donc, lors de rencontre entre races différentes ou avec des canidés sauvages, de possibles incompréhensions, des malentendus et peut mener à une augmentation des conflits intraspécifiques.
Car oui, le canidé, y compris le chien, peut infliger des morsures ou la mort à ses congénères, à d’autres espèces animales mais aussi à l’homme. Il est gouverné par des instincts entraînant des réactions immédiates et non contrôlables ni modifiables. C’est un fait qui est, encore aujourd’hui, souvent passé sous silence ou méconnu, surtout en ce qui concerne le chien. En effet, nous en avons fait un compagnon de vie, présent dans plus de 460'000 foyers suisses actuellement. Nous le laissons en compagnie de nos enfants, l’emmenons partout dans les lieux publics, chez des amis etc. La notion de « danger » est donc minimisée voire ignorée de beaucoup, ce qui est préjudiciable autant pour l’humain (attaques, morsures), pour le chien (méconnaissance de ses instincts/comportements/codes et besoins) que pour ses congénères et la faune sauvage (attaques, mort).
Aujourd’hui en Suisse, il n’existe aucun critère ou condition spécifique à remplir pour posséder un chien, à l’exception de cours pratiques (éducation canine), obligatoires dans trop peu de cantons actuellement. Mais soyons honnêtes : c’est loin d’être suffisant pour réellement comprendre son compagnon, son fonctionnement et cela entraîne, malheureusement, une forme hautement négative d’anthropomorphisme depuis une ou deux décennie(s). Nous reviendrons, plus en profondeur dans le chapitre « Le chien, vrai innocent ou coupable oublié », sur les circonstances qui mènent, très majoritairement aux attaques/morsures sur l’humain. Car, contrairement à ce que beaucoup pourraient penser, le responsable n’est, majoritairement, pas celui qu’on croit…
Dictionnaire
ADN Molécule support de l’information génétique héréditaire.
Génétique Tout ce qui est relatif aux gènes, à l’hérédité.
Intraspécifique Tout ce qui se passe à l’intérieur d’une même espèce biologique.
Anthropomorphisme Tendance à attribuer aux animaux et aux choses des réactions humaines.
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